Jamais un jeu n’a connu autant de commentaires dithyrambiques que Braid. Multipliant les éloges, la presse spécialisée n’en finit plus de faire de la surenchère. Alors, Braid = Jeu du siècle ?
Je commence à être un vieux routier du jeu vidéo. Et pourtant, il y avait bien longtemps que je n’avais vu pareille unanimité autour d’un jeu vidéo. Petit panel significatif :
- Overgame : « Braid est également un vrai jeu d’artiste et, surtout, de perfectionniste. »
- Edge (9/10) : « Jeu magnifique et brillamment exigeant ! »
- Xbox-Mag (19/20) : « C’est une œuvre définitive, magnifique, et il convient de savourer la chance que nous avons de l’avoir vu arriver à maturité. Braid, c’est de l’art. »
- Xboxygen (19/20) : « Braid est une expérience à part, un jeu somptueux… »
- IGN (8.8/10) : « Imaginatif, novateur et captivant, Braid est une réalisation extraordinaire ! »
- Jeuxvideo.com (15/20) : « Braid est un titre envoûtant, unique et poétique »
Avant d’aller plus loin, une petite remise en contexte s’impose.
Braid est donc un jeu de réflexion/plateforme. Traversant des « tableaux », l’objectif est de récolter des pièces de puzzle, sautant de plate-forme en plate-forme et en évitant divers ennemis. Le gameplay est simplissime à souhait, et la maniabilité est parfaite. Toute la difficulté du titre est de trouver le moyen d’accéder aux pièces de puzzle.
Car notre héros est capable de bien des choses : remonter le temps, créer un double de lui-même qui remontera également le temps – vous permettant ainsi de produire 2 actions en simultanés – , ou bien placer une sorte de ‘bulle’ qui ralentira le temps de tout ce qui lui passe à proximité. Tout ceci dans le but de se frayer un chemin jusqu’à ces pièces de puzzle, qui semblent pourtant inaccessibles.
Le jeu est certes très réussi et incroyablement poétique. C’est sans nul doute une véritable réussite artistique. Mais le jeu est court ; il est cher pour un jeu Live Arcade (15€) ; il n’est pas si innovant que ça (gestion du temps similaire à Blinx, plate-forme énormément inspiré de Mario). Alors comment peut-il mériter ces éloges le plaçant parmi l’un des meilleurs jeux de l’histoire ?
Pour le comprendre, il est important de s’attarder sur le créateur de Braid. Ce jeu est l’œuvre de Jonathan Blow, figure de la scène dite ‘indépendante’. Ancien journaliste du milieu du jeu-vidéo, il est connu pour son rejet de l’industrialisation du jeu vidéo et ses critiques très pointues concernant le gameplay. C’est lui qui récemment, remettaient en cause la qualité de World Of Warcraft, qualifiant le titre de Blizzard de jeu au gameplay bien pauvre, qui contournait cette pauvreté en enfermant le joueur dans des taches répétitives et en usant de méthodes de conditionnement psychologique.
Passé de l’autre coté en décidant de produire « son » jeu, Jonathan Blow a donc profité d’un énorme capital sympathie. Ancien journaliste lui-même, à contre courant des méthodes actuelles de production, encourageant et développant le milieu ‘indé’, et, il faut quand même le dire, réalisant un jeu de très bonne facture, Jonathan a fait de Braid une œuvre « Hype ».
Soyons clair, Braid est un bon petit jeu. Mais il n’est rien d’autre. Ce n’est pas, à mon humble avis, une œuvre majeure du jeu vidéo. Bien des titres lui sont supérieurs, au niveau du gameplay comme au niveau de la narration. En écrivant ces lignes, je pense à Ico ou à Okami pour n’en citer que deux. Mais Braid bénéficie d’un a priori favorable. Comme si, comme une évidence, le jeu ne pouvait qu’être bon. Le politiquement correct sévit partout, même dans le monde du jeu vidéo.
Le phénomène ne touche pas uniquement le monde du jeu vidéo. Mais force est de constater que désormais la norme, c’est d’affirmer ne pas être dans la norme. Dans un tel contexte, Braid ne pouvait que faire un carton.