J’ai eu la chance d’être invité dans les locaux d’Arte pour assister à l’avant-première de leur nouvelle série : Xanadu.
Seriously, moi chez Arte ?! Je me sens hype, je me sens intelligent, je me sens beau, je me la joue. La chaîne de Tracks et de Thema, celle que tout le monde aime mais que peu regarde, lance donc une nouvelle série dramatique ambitieuse au format 8 x 52 minutes. Intitulé Xanadu, le programme suit la famille Valadine, une dynastie de l’industrie pornographique sur le déclin.
J’ai donc pu assister à la projection des deux premiers épisodes, suivie d’une rencontre avec la scénariste et instigatrice du projet (Séverine Bosschem), le réalisateur (Podz), les producteurs et un acteur de la série (Phil Hollyday, accessoirement acteur porno dans la vraie vie).
Une série dans l’univers du X, pas sur l’univers du X
Xanadu n’est pas une série érotico-pornographique et ce n’est pas non plus une série sur l’industrie du hard. Le staff a beaucoup insisté là-dessus et j’ai eu l’impression que devoir rabâcher ce point pendant toute la promo commençait à exaspérer sérieusement la créatrice de la série. Mettons-nous d’accord une fois pour toute, Xanadu est une saga familiale dans l’univers du porno, un univers qui véhicule son lot de préjugés et qui sert de prisme pour aborder l’histoire et déstabiliser le spectateur pour stimuler sa réflexion.
Xanadu est la société de production de la famille Valadine, un empire du porno en chute libre pour n’avoir pas su s’adapter à l’évolution du marché. Xanadu va mal, à l’image de la famille Valadine qui offre un panache de personnalités brisées par la vie. Ce parallèle entre la société et la famille est un fil rouge qui guide le spectateur dans une histoire labyrinthique où se mêlent rêve et réalité.
Une série ambitieuse
La série créée par Séverine Bosschem évite avec brio les pièges d’un contexte fortement connoté où d’autres auraient flirté avec la vulgarité et le racolage. Les scènes de sexe servent toujours le propos dramatique et posent la question, notamment, de la différence de traitement entre sexe et violence dans notre société. En effet, la violence, qu’elle soit physique ou morale, n’est jamais loin et cette présence dérangeante aiguillonne le spectateur en permanence. Xanadu n’est pas une série confortable, elle est même exigeante, en termes de contenu donc mais aussi en termes de narration avec différents arcs entrelacés et une frontière perméable entre réel et imaginaire.
Vite, la suite !
A dire vrai, je n’ai pas été totalement convaincu par la mise en œuvre du scénario. L’omniprésence d’Elise Jess en particulier, première femme du patriarche, mère de ses enfants et égérie de Xanadu disparue depuis une quinzaine d’année, m’a laissé perplexe. J’ai aussi eu du mal à accrocher aux scènes oniriques qui, pour moi, parasitent le récit et lui font perdre en puissance d’impact. Par contre, la saga familiale en elle-même est très prenante et cette galerie de personnages au bord du gouffre a un potentiel dramatique énorme. D’autant plus que les acteurs sont magistraux, réussissant à jouer toujours juste malgré des rôles et des situations assez casse-gueules. Mention spéciale à Phil Hollyday qui démontre que les hardeurs peuvent aussi jouer la comédie. J’ai également beaucoup apprécié les touches d’humour qui parsèment ces premiers épisodes et créent un contraste saisissant avec la noirceur générale du récit.
Cet équilibre devrait se prolonger sur l’ensemble de la saison et accompagner la trajectoire des personnages présents dans les premiers épisodes et les nouveaux venus. En parlant des têtes qui restent à découvrir, le staff a été particulièrement élogieux sur la performance de Vanessa Demouy qui a eu le courage d’endosser le rôle d’une hardeuse dans la suite de la série. A plus longue échéance, Podz et Séverine Bosschem ont déjà en tête la direction qu’ils souhaitent prendre pour la seconde saison, si le succès des 8 premiers épisodes le leur permet.
Donnez sa chance à cette série différente, acceptez de vous faire déstabiliser, le jeu en vaut la chandelle. Ce n’est pas si souvent que la télé française propose des projets aussi ambitieux ! En tout cas ces deux premiers épisodes ont éveillé ma curiosité et je regarderai la suite de la saga des Valadine lors de sa diffusion sur le petit écran.
Bientôt sur vos écrans
Alors que le premier épisode sera disponible en intégralité à partir du 27 avril à 23h sur Allociné, Xanadu sera diffusée sur ARTE à partir du 30 avril prochain et les épisodes seront également disponibles après leur diffusion sur le site de la chaîne franco-allemande. Pour des raisons juridiques, le visionnage en ligne ne sera possible qu’entre 23h et 5h du matin. Les contraintes ne s’arrêtent pas là puisque la version télé verra certaines scènes être floutées afin de ne pas choquer la morale (« Cachez cette verge que je ne saurais voir ! »), ce qui est regrettable pour l’authenticité de l’histoire, surtout que les scènes potentiellement choquantes ne sont pas les plus explicites et sont donc hors du champ d’action de la censure…
Crédits photos : Benoit Linder / Nathalie Blanc / Haut et Court / ARTE