Sixième numéro d’Extra Lives, et le plaisir est toujours immense pour moi de tenter de partager avec vous mes émotions de joueur. Je suis fier d’essayer, en toute humilité, d’écrire différemment sur le thème du jeu vidéo.
Sur Ludomaniaque on ne joue plus, on vit. Et cette semaine, place à une invitation au voyage !
À un souffle…
Droit sur mes jambes, je me dresse fièrement devant cette immensité rougeoyante. La chaleur, pourtant étouffante, n’est pas mon ennemie. Serein, je l’apprivoise et transforme ses agressions en caresses. Fier et apaisé, je contemple l’incroyable harmonie des éléments qui se dressent devant moi, ce tableau idyllique ou chaque grain de sable semble à sa place, acteur insignifiant mais indispensable de cette œuvre d’art attirante, mouvante, vivante…
Rien ne semble pouvoir troubler cet équilibre étonnamment parfait, si ce n’est cette curiosité incontrôlable, tellement humaine. Car au loin, juste derrière cette dune immense, une petite lumière s’agite et danse comme pour mieux me narguer. Sans raison aucune, me voilà donc contraint de braver ce sable si doux et si piégeux, attiré par cette chimère comme un marin par le chant des sirènes.
Qui aurait pu croire que le simple gravissement d’un monticule de sable ferait trembler mon cœur et chavirer mon esprit ? Au point de perdre toute notion de temps et d’espace, attiré comme un vulgaire insecte par ces portes ouvertes sur mon imaginaire, à la fois si proches et si inaccessibles. Car tel un assoiffé courant de mirages en mirages, chaque ligne d’arrivée se transforme aussitôt en point de départ. Vers une autre porte, une autre lumière, un autre rêve…
Des émotions nouvelles viennent bouleverser mon état contemplatif. La surprise, devant ces rubans flottants au vent comme contents de me voir. La peur, traqué par ces monstres faits de pierre et de sang. La joie, glissant à toute vitesse de dune en dune porté par le vent.
Et le doute devant cet autre, présent à chaque seconde de mon périple. Si proche que seule une couleur de cape nous différencie, cet être semblant partager le même destin que le mien n’en reste pas moins insaisissable, fuyant, irréel. Est-il un voyageur égaré, un hologramme né pour me guider ou le simple fruit de mon esprit perdant peu à peu la raison ?
Pourquoi suis-je là ? D’où vient cette lumière qui prends un malin plaisir à m’inciter au voyage ? Ces ruines sont-elles l’œuvre d’un dieu ou d’une civilisation inconnue ? Qui est cet autre vêtu de rouge ? Je n’ai aucune réponse et pourtant je suis empli de certitudes. Et comme le dirait Anne Hébert, poétesse québécoise : « Je ne me demande pas où mènent les routes ; c’est pour le trajet que je pars ».
Disponible exclusivement en téléchargement sur PS3, « Journey » fait parti de ces titres absolument incomparables qui marquent le joueur et imprègnent sa mémoire à vie. Dans la lignée de Flower, leur précédent titre, les développeurs du studio ThatGameCompany nous offrent une œuvre à part, brute et envoutante, à contre courant des tendances actuelles. Un jeu vidéo différent et déroutant qui ne plaira pas à tout le monde mais qui ravira les âmes en quête d’un peu de poésie.