Oliver Stone reprend du service et nous propose un Savages qui sent le stupre, l’herbe et le sang. Mon avis après le jump.
Savages, avec Blake Lively, Salma Hayek, Benicio Del Toro, John Travolta, en salle le 26 Septembre.
Synopsis
Laguna Beach, Californie : Ben, botaniste bohème, Chon, ancien Navy Seal, et la belle O partagent tout. Ben et Chon sont à la tête d’un business florissant. Les graines ramenées par Chon de ses missions et le génie de Ben ont donné naissance au meilleur cannabis qui soit. Même s’il est officiellement produit pour des raisons thérapeutiques, ils en dealent partout avec la complicité de Dennis, un agent des stups.
Leur affaire marche tellement bien qu’elle attire l’attention du cartel mexicain de Baja, dirigé d’une main de fer par Elena. Face à leur proposition d’«association», Chon est partisan de résister par la force, mais Ben préfère tout abandonner. Pour les contraindre à coopérer, le cartel kidnappe O. Elena a eu raison d’utiliser les liens très forts du trio, mais elle a aussi sous-estimé leur capacité à réagir…
C’est le début d’une guerre entre l’organisation du crime dont le bras armé, Lado, ne fait aucun cadeau et le trio.
Qu’il s’agisse de pouvoir, d’innocence, ou de la vie de ceux qu’ils aiment, tout le monde a quelque chose à perdre.
Gangsters et gentleman
Où le réalisateur de Tueurs nés veut-il nous emmener avec cette histoire de cartels et de ménage à trois ? Une semaine après avoir eu la chance de voir le film en avant-première je me pose toujours la question.
Savages a en quelque sorte le cul entre deux chaises. Une fesse dans le thriller brut et violent comme le suggère son titre, et une deuxième dans un délire grinçant parfois absurde à la Snatch et consorts. Si prises séparément ces 2 voies sont prometteuses, l’amalgame m’a laissé dubitatif puisque chaque changement de ton vient désamorcer les prémices d’une montée en puissance dans l’autre registre. Ce malaise est clairement visible dans la construction des personnages par exemple. Ils finissent tous par perdre leur crédibilité à un moment ou un autre, et même Del Toro pourtant parfait dans son rôle de tueur sadique au service du cartel finit par n’être plus qu’une caricature de son personnage.

Savages souffre donc d’un manque de cohérence également visible à travers un scénario tantôt naïf, tantôt tissé de rebondissements en cascades dont l’aboutissement illustre parfaitement les errements.
Attention, spoilers ! La lecture du paragraphe suivant dévoile la fin de l’intrigue, il révèle aussi où est Charlie et où est donc Ornicar.
Savages n’a pas une fin, il en a deux. D’abord, une fusillade grandiloquente conclue par la mort de tous les personnages principaux, comme une sorte de Roméo et Juliette moderne. Puis, un rewind où la scène est répétée avec intervention des forces de l’ordre, où les méchants sont punis et où les gentils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. La première version, quoiqu’un peu kitsch, avait le mérite de donner un éclairage ironique au film et d’assumer enfin le délire sous-jacent réprimé par Oliver Stone pendant 2h15. La version finale est elle juste foirée.
A moins que…
A moins que Savages ne soit qu’un fantasme alimenté aux vapeurs cannabiques, qu’une invention de l’esprit embrumé d’O la pauvre petite fille riche jouée par Blake Lively qui se trouve au cœur de toute l’histoire. Ça expliquerait tout : la voix off, le scénario de série télé, la première demie heure racoleuse à souhait qui voit s’enchaîner 3 scènes de cul gratuites (Ben + O, Chon + O, Ben + Chon + O ou «le plan à 3 promis dans la bande annonce») et des séances de fumette pour faire triquer les ados, les incohérences et les inconstances des personnages, la fin rejouée et même deux trois trucs bien pervers.

Ça expliquerait tout, mais ça ne suffirait pas à faire de Savages un bon film. Allez y pour Benicio, John et Salma, allez y pour quelques scènes d’action bien ficelées, allez y pour reposer votre cerveau quelques heures, mais n’y allez pas pour voir du grand cinéma.